Vie locale

 

ASSEMBLEE GENERALE 2020

 

Chers camarades agités réunis en ce 16 octobre de l’an de grâce 2021, soyez les bienvenus à l’assemblée générale, ordinaire, répétitive, d’obédience formelle, mais on l’espère, conviviale des Agités du local. Et veuillez ouïr avec toute la sollicitude qui vous est donnée le rapport d’activité plus ou moins moral de l’association sus-mentionnée que je me dois de vous délivrer en tant que présidente.

Oyez oyez le chapitre n°11 de l’épopée des agités du local, le rapport moral le plus laconique de toute la vie des agités.

L’assemblée générale est l’occasion qu’il nous est donnée, tous les ans, de revenir sur une année écoulée. Prenons au pied de la lettre les mots usités, et essayons de dessiner le moral des agités. Pour cela, imaginons une onde progressive périodique résultant de la perturbation volontaire de nôtre milieu, perturbation de nature vibratoire, sonore et lumineuse. Sa fréquence est variable, elle dépend, certes, du taux d’humidité fortement épisodique de nos contrées mais surtout d’un contexte ambiant plus ou moins vigoureux. On notera des moments de pression, de dépression, d’impression mais la continuité entre ces différents états vibratoires poursuit son chemin malgré le nomadisme sporadique qui nous caractérise. On va, on vient, on se retrouve, nous pourrions recenser plus de haut que de bas, c’est le collectif quand même.

Cette année, Claude s’en est allée en Bretagne, quand Olivier et Mathias sont arrivés pour étoffer l’équipe. Des bas certes mais plus de hauts vous disais-je.

Mais ce fut une année plus compliquée que les autres, un été plus différent. Les tentatives de gestion de la crise sanitaire appliquée à la pratique du lien social et musical qui nous anime nous ont bien pris la tête. Déjà que dans sa tête à soi tout seul c’était compliqué, ajoutez à cela notre nombre et cette tendance que l’on pratique de prendre des décisions en faisant. L’état d’urgence permanent et normalisé, les injonctions au contrôle, les ronrons identitaires, l’afflux constant d’informations, de données et de directives soudaines, d’échanges viscéraux, nos velléités de critique et dissection d’un système économique et politique nous traversant de part en part, les débats qui nous agitaient dans nos corps et dans nos tronches…Tout cela n’a pas eu raison de ce faire ensemble qui nous joint. Cette année, il y aura eu les annonces, suivies ou pas d’effets, les décrets, la loi d’urgence, mais il y aura eu surtout la mise en situation, le concret, les chemins de traverse, le jeu, et encore et toujours le faire ensemble avec le plus de discernement qu’il nous était possible de sécréter.

Cette année, il y aura eu jusqu’ici 7 événements agités à recenser dans la contrée, de septembre [longe pause] à octobre : Laurent Montagne et la rencontre des galettes, Pantais Clus avec le KPCM et la Femag à l’ARRU, Rovski avec le Festival du Cinéma Belge, Magon et Papillon, Sol, Heeka, Moonlight Benjamin et la conférence punk de Sapritch à Belvezet, Laurent Benitah Trio avec le festival de la Bande Dessinée à Uzès.

On a tenu le coup. Et en musique. On a décidé de maintenir, on n’a pas jugé, on a joué. Et c’était pas dégueu. Nous sommes toujours garants de nos statuts gravés dans le ciment du théâtre de verdure : proposer aux habitants de Belvézet et des alentours, des manifestations musicales variées, populaires, et de qualité, et ce tout au long de l’année, en entrée libre. La liberté, elle est beaucoup convoquée et revendiquée ces derniers mois. L’affirmation de ce principe est radicalement ancrée chez les agités. Mais dans l’expression « entrée libre », il y a aussi l’égalité que l’on vise et que l’on cherche à rendre tangible, un peu plus discrète que la liberté, moins dans le collimateur des médias d’autoroute, moins désirable, mais tellement belle de l’intérieur. Plutôt que le contrôle, et le possible contrôle du contrôle, et peut-être la promesse d’un contrôle des contrôles des contrôles, j’en mettrais mes cheveux à couper que les agités privilégient le bordel certes, aussi la responsabilité de chacun aussi et surtout la confiance.

On a tenu le coup. Même si des fois, on n’avait plus envie, que le contexte n’était pas très bandant, que nous nous opposions au fait de contrôler nos congénères, à part au moins un des agités grand nostalgique du service militaire.

En 2021 donc, les agités du local ont déménagé, emménagé, retapé des baraques, habité des espaces, brassé des Brassens, sont allées au charbon, ont déserté, vendangé, tombé amoureux, retombé, largué des amarres, fait des enfants, perdu du travail, puis trouvé, glandé, contemplé, écouté, loupé, réussi, fait des arbres généalogiques, appris des trucs, épilé des kiwis, manifesté, pratiqué la dure lutte, organisé 9 événements. Ils ont soutenu l’occupation des lieux culturels au printemps contre la réforme de l’assurance chômage et pour la réouverture de l’espace public, ont pensé un temps à aller occuper l’Ombrière, avant de se demander si celle-ci était vraiment un lieu culturel.

En 2021, on a bientôt 12 ans, c’est quand même beau dans une vie d’avoir à nouveau douze ans, voilà un des bienfaits qu’apporte le faire ensemble.

Nous sommes toujours autant des manutentionnaires (chacun porte selon ses besoins et ses capacités) nomades, en camion diesel, mutualisant, s’arrêtant pour une soirée et repartant sans laisser de trace (bon d’accord sauf une fois à Saint Laurent la Vernède, il y a bien longtemps et c’était même pas nous), toujours d’humeur paléolithique.

Mais on a réintégré le théâtre de verdure de Belvézet, en partenariat avec la Mairie et la nouvelle association débit de boisson et tapas des Amis de l’Arbousier. On a établi un campement hebdomadaire à la grotte de la Salamandre, programmé des groupes en grottes et en terrasses, pour une expérience acoustique et électrique pas ordinaire. On s’est fait nourrir par le généreux Nico, abreuvé par la Calade et le nectar de Jullian, boisson des dieux apolliniens en cubi. On a investi pour la première fois de notre existence la place aux herbes d’Uzès, perturbant au passage l’existence paisible d’un voisin vigilant et la soirée du maire. Nous avons encore eu en interne des discussions sur le bruit, le son, les nuisances, la musique, la vie de la nuit, des débats sur l’écriture inclusive, l’envoi de mail, mis fin au google groupe, travaillé la déco, pas encore statué sur notre identité visuelle, salué les petits films d’Hervé, agité les ondes radio car l’amplification n’a pas de limite , on n’a pas encore fêté notre anniversaire, on fraye avec les énergies locales associatives bouillonnantes (les radios du Gard, dont Fuze la plus proche, la recyclerie l’Arru, le KPCM, l’Abrix Bar, le cinéma belge, les amis de l’arbousier, la Bruguière Écologie, Frip’so. Il y a encore du désir en nous, j’en suis sûre, malgré toutes ces années, et un petit paquet de choses peut-être encore indéfinies à faire ensemble.

Amitié-Musique-chien fou

Elle est là cette trinité détonante qui relie ces 16 administrateurs/bénévoles/agités que nous sommes, ce nerf palpitant qui nous rassemble dans l’organisation d’événements ouverts à tous.

Je clos ce rapport moral en bonne et non du forme, je le soumets à votre jugement, espérant avoir esquissé comme un petit rappel de choses simples n’ayant pas vocation à empêcher des pensées plus complexes, et à la fin de sa lecture, je sens, comme le dit, dans le film Little Big Man, le cheyenne Peau de la vieille hutte (non ce n’est pas une contrepèterie) : « mon cœur léger [qui] s’envole comme un faucon. »

Approuvé à l’unanimité par le CA des agités

Le 16 octobre 2021


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Les agités en plein boulot

 

(Janvier 2021)


 
 

 
 
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